L'AGE DU BRONZE DANS LES HAUTES-ALPES
par M. Jacques-Claude Courtois
Première partie
Nous n'avons actuellement à notre disposition pour tenter une reconstitution d'ensemble des civilisations de l'Age du Bronze dans les Hautes-Alpes qu'une série, abondante certes, d'objets conservés dans les Musées et les collections privées. Ces multiples objets furent recueillis par des paysans ou le plus souvent même par des bergers qui les découvrirent fortuitement, soit au cours de travaux agricoles, soit au cours de leurs déplacements en montagne avec les troupeaux. D'autre part, les violents orages qui entraînent parfois un très fort ravinement dans ces régions maintenant très déboisées partagent avec le soc de la charrue la responsabilité du plus grand nombre des découvertes faites depuis près d'un siècle dans les Alpes du Dauphiné.
Dans ces conditions, et faute d'observations scientifiques, les objets de musée perdent une grande partie de leur valeur : ils ne représentent plus que des sortes d'épaves documentaires, hors de tout contexte archéologique précis. Ainsi, pour le classement chronologique des trouvailles, nous devons recourir à la seule méthode possible, à la typologie comparée. Ce que le Professeur Marc Sauter a dit dans sa « Préhistoire du Valais » au sujet de l'Age du Bronze dans ce canton helvétique, s'applique également très exactement à la situation des Hautes-Alpes françaises :
« On a très vite saisi la position particulière du Valais dans le tableau des civilisations et des cultures de cette période. Les préhistoriens de langue allemande ont parlé de « Walliser Kultur » ou de « Rhonekultur ». C'est dire l'intérêt que nous aurions de connaître en détail les manifestations de cette civilisation ; mais c'est dire en même temps notre regret d'ignorer quasi tout de celle-ci. En effet, si les musées de notre pays sont riches en collections d'objets provenant de l'Age du Bronze valaisan, à cette abondance correspond une ignorance totale des conditions exactes de trouvailles de ces objets ; on n'a — sauf à La Barmaz-sur-Collombey, mais ce gisement est pauvre — jamais eu l'occasion, en Valais, de fouiller systématiquement une tombe de cette époque. Presque tous les objets proviennent de destructions, surtout lors de défoncements de vignes ; et quand on connaît la densité des trouvailles de tels sites — Sion, Conthey ou Fully par exemple — on déplore encore plus vivement cette lacune.
En effet, tout essai de classification de l'Age du Bronze valaisan ne sera qu'une hypothèse tant qu'on devra se contenter de grouper les milliers de haches, de poignards, d'épingles, de brassards, etc., selon leurs formes et selon leurs analogies avec ce qu'on connaît dans d'autres régions. D'autre part, on ignore presque tout de la céramique valaisane de l'Age du Bronze ; or la céramique est d'une aide très précieuse quand il s'agit de mettre de l'ordre dans une période préhistorique. »
